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13 février 2016 6 13 /02 /février /2016 11:22

     L'addiction, pris dans le sens de dépendance à des activités qui agissent à terme négativement sur le corps, constitue un élément résultant et provoquant une série de conflits, que l'on pourrait qualifier d'à double détente.

Premièrement, se dynamise un conflit interne à la personne, par le recours à des activités nocives à terme pour satisfaire des besoins immédiats et deuxièmement se dynamise un conflit social entre acteurs entretenant l'appétence à ces activités et une foule  d'autres déployant des interdits moraux et légaux.

    L'alcoolisme est bien représentatif de cette problématique : l'absorption d'alcool provoque un bienfait immédiat, prélude à des dégâts physiologiques majeurs à terme pour les personnes qui y sont addictives et sa consommation est  valorisée, proposée, conseillée par une quantité d'intérêts économiques, tandis que des autorités, inquiets des dégâts individuels et sociaux provoqués par l'ivresse privée ou publique combattent ces intérêts-là, de manière plus ou moins frontale. L'enchevêtrement des conflits intra-corporels et des conflits sociaux (de la famille à la société toute entière) est aussi une caractéristique de ces addictions. Elles font partie souvent de la culture et même de la civilisation d'une population donnée. 

    Beaucoup d'études prennent pour point de départ les différentes addictions pour en définir les "thérapeutiques" individuelles ou de groupe. Mais les addictions ne constituent pas un point de départ ; elles s'inscrivent dans des trajectoires individuelles et collectives, dans des ensembles sociaux de comportements, dans une société souvent inégalitaire et d'injustices diverses et variées. Des observateurs ont bien relevé le lien entre la multiplication des addictions de toutes sortes (de l'alcoolisme au tabac, des hallucinogènes à des comportements jugés plus "sociaux" et comportant pourtant une part de compulsions à répétition : conduite automobile forcenée, consommation audio-visuelle à outrance, usage à tout bout de champ d'outils de "communication" ou de jeux vidéos...) et d'une organisation sociale inégalitaire et laissant une place énorme à des pauvretés de toutes sortes également...

Au niveau psychologique et biologique, on peut sans peine utiliser la problématique principale de l'agressologie : les comportements d'addiction ressemblent bien à des comportements de fuite devant ds réalités globales peu propices à l'épanouissement des potentialités humaines. Au niveau de la sociopsychanalyse, on pourrait multiplier les facettes d'observations de ces comportements d'addiction, parfois hautement valorisés. Au niveau socio-politique, l'accaparement du temps des victimes de l'injustice sociale (des violences sociales) à des activités addictionnelles laisse tranquilles les nantis du système. Quoi de mieux que le détournement de toute une énergie sociale vers des activités individuelles qui l' épuise? 

       Toutes ces considérations jetées ici font l'objet de plus en plus de recherches. Le champ est assez considérable, des addictions les plus évidentes (alcool, tabac, hallucinogènes, surconsommation audiovisuelle) qui touchent un ou plusieurs des cinq sens aux addictions camouflées en nécessités économiques ou sociales (automobile, communication, l'argent).

De mauvaises langues, pourtant pas si mauvaises que cela, pourraient y ajouter les addictions religieuses, sportives ou politiques (fuite vers l'au-delà ou dans un collectif vague), les addictions sexuelles (surexcitation plus ou moins permanente), les addictions sur la beauté du corps, les addictions des collectionneurs, bref tous ces comportements de dépendance qui semblent souvent "normaux" et qui cachent bien des motivations parfois inconscientes. Maintenant, il faut se garder de voir les réalités à travers des addictions... même si elles ont tendance à s'additionner. Et à se camoufler également. Elles constituent des éléments de conflits d'importante intensité, pour la personne comme pour l'ensemble de la collectivité.

C'est sans doute les addictions politiques qui font l'objet d'études, entre sociologie et philosophie politique : l'exercice du pouvoir corrompt mais, plus il se prolonge et s'intensifie cet exercice semble devenir nécessaire, non pas comme on pourrait le croire ou faire croire, parce que les citoyens en général (ou les supporters en particulier) en bénéficie trop pour s'en passer, mais pour celui qui l'exerce lui-même. Le nombre de politiques - élus ou non, à grande dimension ou non - qui perdent le pouvoir et qui ensuite développent de véritables malades psychosomatiques graves est relativement impressionnant. A ce point qu'il existe même une partie de la profession de spécialistes psychologues-psychiatres qui s'y intéresse et... y tire grand profit à développer... leur profession. La relation entre addiction (et pas seulement politiques) et pouvoir constitue même un thème de philosophie politique.

 

 On regardera bien entendus du côté des comportements d'agression, causées ou aggravées par ces addictions, comportements qui forment une chaîne quasiment sans fin dans les relations sociales. On se garde de plus en plus heureusement de tout fixisme moralisateur (encore que...) en analysant ces addictions, à la fois résultante et origine de bien des caractéristiques sociales, sans oublier les soubassements économiques qui les permettent et très souvent les encouragent.

 

SOCIUS

 

Relu le 13 mars 2022

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