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29 janvier 2018 1 29 /01 /janvier /2018 10:18

    Le commandement d'armée ou des armées fait l'objet d'une très abondante littérature, tant sous forme de notes à l'intention des officiers ou élèves-officiers, de traités spécialisés que dans la presse à destination de publics les plus variés. Entre les écrits techniques et les écrits politiques, entre les théories tenant compte des changements de dimension ou de qualité des armées et les plaidoyers des chefs militaires eux-mêmes, le champ est effectivement vaste. D'autant que le destin d'une guerre influait (moins aujourd'hui, pour diverses raisons) sur les carrières politiques et militaires. Des récits de chefs militaires, capables parfois de transfigurer une cinglante défaite et victoire glorieuse (à des époques où les communications sont jalousement surveillées) aux traités parfois très techniques sur les modalités d'exercice du commandement, il y a tout un monde.

On connait bien l'adage suivant lequel la victoire revient aux soldats et la défaite au commandant. Et pourtant les réalités politiques sont beaucoup moins simples que cela, et surtout autour de celui-ci tourne toute une sociologie des relations entre opinion publique/populations et Commandement politique/Commandement militaire. Ici, nous nous attachons surtout à comprendre comment le commandement a évolué dans l'Histoire et quelles sont les variantes aujourd'hui des commandements suivant différents Etats. La situation est encore plus appelée à se diversifier/complexifier avec la délégation d'opérations militaires à des groupes privés, rappelant les appels d'autrefois aux milices privées et aux mercenaires de tout genre.

 

Des évolutions importantes du commandement.

      Traditionnellement, le commandement en chef d'une armée est souvent aussi le chef politique de son pays. Il élabore les plans stratégiques et les fait mettre en application. Stratège tout autant que général, le commandant en chef possède l'autorité morale qui lui permet de mener ses troupes au combat. S'il fait confiance à ses subordonnés, le commandant en chef n'en détient pas moins le pouvoir sur le champ de bataille.

Héros, il goûte le premier à la gloire qui suit la victoire. Il est aussi le premier accusé lorsqu'intervient la défaite. Néanmoins, comme on l'a dit plus haut, les réalités sont moins simples que cela. Si cela se vérifie dans le temps immédiat, notamment en ce qui concerne la relation entre le commandant et ses troupes, surtout lorsqu'historiquement le commandant mène lui-même ses troupes à la bataille, c'est moins vrai au fut et à mesure que la chaine de commandement s'étire en fonction de la masse et de la complexité des armées. 

Jusqu'au XVIIIe siècle, le commandant en chef d'une armée, parfois assez réduite, est souvent placé à sa tête d'où il mène physiquement les combats et peut exhorter ses troupes à le suivre dans son action. Cette pratique est évidemment périlleuse et très nombreux sont les princes, les comtes..., les généraux en chef qui meurent en pleine bataille, souvent au moment même où ils remportent la victoire (Gustave Adolphe de Suède, Frédéric le Grand de Prusse, pour prendre des exemples "récents").

Le commandement a évolué progressivement au cours des deux cents dernières années, devenant une activité beaucoup plus complexe qu'auparavant. La fin du XVIIIe siècle voit les armées se transformer en des corps malléables dont les divisions peuvent fonctionner de manière autonome. Ce type d'armée exige plus de souplesse et de maîtrise au niveau du commandement. Avec l'arrivée de NAPOLEON, héritier des nouvelles doctrines militaires, la révolution stratégique entraîne une révolution dont les effets se font sentir longtemps après la mort de l'Empereur.

Mais on peut faire remonter l'évolution du commandement plus loin, avec la transformation même de la guerre. En effet, à partir du moment où les armées sont composées de troupes nombreuses et que la guerre elle-même n'est plus principalement une guerre de sièges dans laquelle pouvaient agir séparément plusieurs corps de troupes, les uns étatiques, les autres relevant du mercenariat, mais une guerre de position et de mouvement, les relations entre le commandement et les troupes changent, avec une vision complètement différente de l'unité de combat. Alors qu'auparavant, l'état militaire requierait des compétences personnelles d'habileté, de courage et même techniques particulières - somme toute un caractère guerrier outillé de connaissances réelle -, avec les nouvelles manières de faire la guerre, est beaucoup  plus nécessaire un soldat uniforme, interchangeable, qui, du moment qu'il obéit comme un automate (ou comme un cadavre, comme dirait une célèbre maxime d'un ordre religieux) sur le champ de bataille, dans son unité en campement ou en manoeuvre, avec des vertus de courage certes, mais surtout de discipline. Il doit bien plus être capable de marcher à l'unisson de ses camarades dans une ligne ou une colonne que de faire preuve de furie guerrière... Le soldat ne donne pas son avis au commandant sur la manoeuvre, le guerrier si et à la mesure de ses compétences, notamment s'il est un véritable vétéran. Au fur et à mesure que le temps passe, l'habitude est de faire subir au soldat un entrainement à marcher au pas, à courir, à s'élancer, à tirer avec ses camarades, pour que sur le terrain, le commandant puisse faire bouger ses troupes avec des capacités de choc et de feu, exactement comme des pions dans une partie d'échec... Cette manière de faire la guerre n'intervient pas forcément progressivement "des origines à nos jours". Les armées romaines étaient formées elles aussi bien plus de soldats-techniciens que de guerriers... Et cela donne au commandement une allure tout-à-fait différente.

De nos jours et à partir de la fin du XVIIIe siècle, le commandement est avant tout une affaire de maîtrise, et de contrôle, des armées et des opérations. Jusqu'à l'ère napoléonienne, le chef suprême peut contempler à l'oeil nu l'évolution de ses armées sur les champs de bataille, d'où l'importance de ce fameux coup d'oeil dont sont dotés les grands généraux. NAPOLÉON lui-même se plaçait au sommet d'une colline pour observer l'évolution de ses troupes. Cependant, avec les effectifs qui se multiplient et avec la décentralisation qui s'opère à divers niveaux, le contrôle des opérations devient de plus en plus compliqué et difficile. Souvent, le chef n'est plus au courant des événements les plus importants. L'Empereur lui-même se trompe sur les mouvements des troupes, surtout avec sa manie de vouloir tout diriger personnellement. La visibilité des combats diminue et il devient difficile de les diriger avec exactitude, surtout s'ils s'enchainent d'un terrain à un autre... La décentralisation en revanche donne de la marge pour la mobilité des troupes, pourvu que les armées se soient dotées de moyens de communication des ordres et des contre-ordres, à renfort de sophistication dans le maniement des fanions comme dans les rythmes de la musique, comme dans également tous signaux visuels et auditifs de manière générale. On comprend mieux l'importance de tous ces sons sur le champ de bataille, qui indique aux soldats groupés où et quand ils doivent marcher ou tirer... surtout que le temps n'est pas toujours clair (brouillards, pluies, vents...)

Au cours du XIXe siècle, l'organisation des armées et du haut commandement évolue rapidement. Ces transformations sont accomplies grâce aux progrès réalisés dans le domaine de la technique. C'est à cette époque que les moyens techniques vont permettre une circulation de l'information beaucoup plus rapide que le déplacement des armées. C'est aussi le moment où la quantité d'informations disponibles va dépasser la capacité d'un seul individu à pouvoir dominer tous les renseignements à sa disposition. A partir de ce moment, il devient impératif que le commandant en chef des armées puisse déléguer certaines des tâches qui lui revenaient auparavant tout en maintenant le contrôle général des opérations. Il doit aussi développer un système de communication élaboré et rapide. La formation des officiers est elle aussi améliorée afin d'adapter les armées à la guerre moderne en créant des chaînes de commandement efficaces et fiables. 

C'est précisément après la défaite d'Iéna que la Prusse entreprend un effort, qui est poursuivi pendant plusieurs décennies, pour sélectionner, former et organiser le haut commandement de son armée. Ce pays crée des écoles de guerre très sélective et se dote d'un état major général aussi puissant que compétent qui sert ensuite de modèle, d'exemples, à de nombreuses armées dans le monde entier. l'état-major de type prussien adopte un "style autoritaire" où dominent les forces de l'armée de terre. D'autres pays, comme l'Angleterre et les Etats-Unis, adoptent un haut commandement constitué par les chefs d'état-major de l'armée de terre, de la marine et de l'aviation qui oeuvrent sur un pied d'égalité. En marge de la volonté de réorganisation du haut commandement, les progrès techniques dans le domaine des communications, et aussi du renseignement, modifient considérablement la manière dont sont prises les plus hautes décisions en matière de stratégie, tout comme les décisions en matière d'opérations et de tactique. D'ailleurs, le concept de commandement dans son sens le plus large comprend souvent aujourd'hui les communications et le renseignement. Si, à l'origine, l'essence du commandement est contenu principalement dans les qualités personnelle du chef, la nature du commandement consiste désormais en une combinaison de facteurs ayant trait à la personnalité des chefs tout autant qu'aux qualités d'organisation de toute une armée. A ces deux éléments fondamentaux vient s'ajouter un troisième : l'autorité dont est investi le chef militaire par les responsables politiques. Ce troisième élément est encore l'objet de nombreux débats depuis le XIXe siècle. Ces débats, qui avaient surtout trait aux théories de CLAUSEWITZ sur les relation entre l'autorité politique et l'autorité militaire en temps de guerre, perdurent : les deux guerres mondiales, la guerre de Corée, la guerre d'Algérie, les guerres du Golfe démontrent les difficultés à tracer cette frontière entre autorité suprême et autorité militaire.

La plupart des traités et manuels de stratégie, depuis l'Antiquité jusqu'à nos jours, accordent une part importante de leurs analyses au commandement. Jusqu'à une période récente, ces analyses étaient exclusivement consacrées à la personnalité du commandant et variaient peu. Les qualités du chef étaient innées (on croit beaucoup aux liens du sang dans les armées...), comme l'instinct, le coup d'oeil, l'intelligence, le charisme et le courage, puis cultivées au cours de longues années passées sur les champs de bataille. La connaissance des hommes et du terrain, de son armée et de ses adversaires était acquise par l'expérience. La maîtrise des instruments militaires s'apprenait avec la pratique. l'étude approfondie de l'Histoire, surtout celle des grandes batailles, complétait les connaissance nécessaires à faire un grand chef. Dans les années 1930, le portait du chef de guerre que dresse Charles de GAULLE dans Le Fil de l'Épée n'est pas très différent de celui qu'établissait ONOSANDER près de deux mille ans plus tôt. Cependant, l'évolution de la guerre, et aussi celle des idées, au cours des XIXe et XXe siècles, contribuent à marginaliser le rôle du chef de guerre par rapport aux autres aspects du commandement. Seuls peut-être les grands stratèges de la guerre révolutionnaire et de la guérilla, Mao ZEDONG, Ho Chi MINH, T.E. LAURENCE, ont gardé la dimension héroïque qui caractérisait les grands hommes du passé. Adolf HITLER fut probablement le dernier individu à tenir entre ses mains un pouvoir politique et militaire aussi énorme que celui dont il bénéficie lors de la Deuxième Guerre Mondiale, pouvoir absolu qui contribue à ses succès, puis à sa chute. Durant la période de la guerre froide, les gouvernements des grandes puissance nucléaires exploitent la diplomatie et la dissuasion tout autant que les instruments militaires conventionnels pour mener leur politique. Les grandes décisions sont entre les mains des politiques, à l'image de la crise de Cuba en 1962. Que le commandant soit plutôt un chef dans le sens traditionnel ou un "gestionnaire", son rôle moral et psychologique est toujours aussi important. L'usage des médias modernes, particulièrement la transmission ou retransmission télévisée, est un instrument efficace à la disposition du commandant d'aujourd'hui ,qui lui permet de communiquer avec les soldats mais aussi avec les populations civiles. L'usage massif des nouveaux outils numériques de communication démultiplie cette fonction. La traditionnelle harangue aux soldats avant la bataille, ritualisée dans le combat antique, constitue toujours le moyen principal dont dispose un chef pour communier avec ses troupes avant de partir au combat. Lors de la guerre du Golfe, le général Norman SCHWARZKOPF, par ailleurs interlocuteur incommode des autorités de Washington, prononça un discours à l'adresse de ses troupes la veille de la grande offensive contre l'Irak.

Comme le souligne l'historien militaire John KEEGAN, l'évolution du commandement "héroïque" du passé vers le commandement "post-héroïque" d'aujourd'hui ne modifie en rien le problème fondamental du commandement qui peut se réduire à deux fonctions : savoir et voir. Ces deux éléments complémentaires permettent à celui qui commande d'agir. Il concerne la connaissance de la culture de l'adversaire tout comme ses mouvements de troupes ou le nombre de matériels de combat dont il dispose. Ce savoir contribue à la vision que possède le haut commandement de la situation et lui permet d'agir selon les moyens dont il dispose en rapport avec ceux dont bénéficie l'adversaire. C'est l'intelligence des rapports de force qui lui permet de choisir sa stratégie. Si la nature fondamentale et la fonction du commandement restent les mêmes, en revanche, la forme que prend le commandement, dans l'espace et dans le temps, change. Mais quels que soient ces changements, la structure du commandement doit être adaptée à la nature du conflit dans lequel est engagé un pays et aux stratégies employées. De nos jours, la rapidité des progrès techniques aptes à modifier la structure de commandement, est aussi importante que les mutations politiques intervenant au niveau international. Les types de conflits auxquels une nation peut être confrontée sont beaucoup plus nombreux que par le passé - guerre nucléaire, guerre classique, guerre limitée, guérilla. Chaque type de conflit requiert une structure de commandement adaptée à la situation. Dans les guerres contemporaines, le commandement doit non seulement être efficace d'un point de vue militaire mais il doit aussi s'harmoniser avec la mouvance politique du gouvernement qu'il représente. L'épisode de la guerre de Corée, marquée par la tension entre TRUMAN et MACARTHUR, démontre qu'un bon choix militaire (celui de MACARTHUR comme commandant en chef des forces des Nations Unies) n'est pas nécessairement un bon choix politique. On se souvient des initiatives du commandant en chef et de ses pressions pour l'utilisation de l'arme nucléaire dans une situation critique. La guerre du VietNam, parmi d'autres, fournit la preuve qu'une structure de commandement conçue pour une guerre classique est trop lourde et moins efficace dans le cadre de la guérilla. (BLIN et CHALIAND).

 

Les qualités immuables d'un commandement.

      D'une façon générale, on peut dire que le commandement militaire repose sur trois fondements :

- les qualités du chef, morales et physiques, par lesquelles il inspire confiance à ses hommes ;

- l'autorité donc ce chef est investi par le pouvoir politique et militaire ;

- la discipline des cadres subordonnés et de la troupe.

On attend d'un chef militaire qu'il soit capable de faire face à des difficultés de toute nature, dont l'affrontement des réalités les plus sordides de la guerre. Le développement de la fermeté du caractère apparaît donc comme étant en définitive la base la plus profonde sur laquelle repose le commandement. L'éthique militaire, qu'elle quelle soit (elle peut paraître scabreuse ou formidable...) compte au premier plan. Les voies par lesquelles un futur chef parvient, en quelque sorte, à organiser en soi cette fermeté sont diverses et variées, mais il semble bien que la pratique d'ouvrages dans lesquels se trouve confirmée sa vocation soit irremplaçable. Le développement d'une endurance à toute épreuve ne saurait manquer de traduire par des faits la résolution prise par un homme d'assumer une mission de chef. Si la vocation est profonde, il acceptera d'en apprendre, durement, le métier.

Avant de conduire lui-même d'autres hommes et d'exiger de leur part qu'ils fassent ce dont ils n'ont souvent aucune envie, un futur chef doit apprendre à obéir. La base de toute science est la connaissance des erreurs, c'est en exécutant des ordres maladroits, voire débiles, en essuyant des reproches souvent injustes donnés par des chefs qui apprennent, eux aussi, leur métier, que l'on apprend ce dont il est fait. Peu à peu, on découvre en effet que si l'homme ne semble pas prédisposé naturellement à la discipline, il éprouve bel et bien, au fond de lui-même, le besoin de se surpasser. le chef qui lui permet de la faire, en intervenant à bon escient, par son exemple, par son sang-froid et par la clarté de son jugement, peut gagner sa confiance. La réciproque est vraie aussi : un homme qui témoigne sa fidélité à son chef contribue dans une mesure considérable à fortifier ses résolutions.

Ayant considéré la base sur laquelle repose le commandement, il convient d'examiner la perspective dans laquelle s'inscrit son action. l'objectif prioritaire, que tout chef doit s'efforcer d'atteindre, consiste à gagner son premier combat. Le prix qui doit lui être consenti pour y parvenir est très élevé, car il s'agit d'acquérir des connaissances qui ne se livrent pas sans d'autres. L'étude approfondie de l'adversaire vient ici en premier lieu ; un chef militaire doit avoir l'esprit assez délié pour apprendre sa langue, sa façon de penser et parvenir ainsi à se mettre, en quelque sorte, "dans sa peau". D'ailleurs, c'est si vrai que les multiples manoeuvres et les multiples jeux de stratégie sont utilisés souvent pour parfaite cette connaissance. Rien n'est plus puissant à ce niveau qu'un côtoiement passé (dans une situation d'alliance ou même d'allégeance) avec l'ennemi, chez l'ennemi. En pénétrant constamment dans la mentalité de l'adversaire et de la manière dont il a l'habitude d'élaborer ses dispositifs de combat, il acquiert une connaissance précise de ses points forts et de ses points faibles. Il complète cette recherche par une série d'études de cas concrets, dans l'Histoire, pour connaitre la physionomie de nombreux combats et vivre quotidiennement (comme on le ferait au moyen d'un simulateur) dans l'atmosphère d'incertitude et de crise qui caractérise la guerre. (Daniel REICHEL)

Cette démarche est impossible à vulgariser et ce n'est pas pour rien qu'il n'existe pas, à l'exception de manuels de commandement parfois bien succincts issus de l'institution militaire, d'études de synthèse dans ce domaine. Une qualité essentielle du chef militaire est précisément d'être capable de faire face à l'imprévu, dans des situations imprévisibles, dans des lieux improbables et dans des délais souvent très courts. 

 

Les commandements modernes.

    Le commandement est devenu une activité qui combine l'interaction de trois composantes essentielles : l'organisation du commandement, les systèmes  de commandement et les processus de commandement. Cette trilogie est exprimée depuis les années 1970 par le concept de C3I (Command, Control, Communications and Intelligence) qui a évolué en C4I2 (Command, Control, Communications, Computer, Intelligence and Interoperability). la nouveauté de ces concepts est de rassembler en un système cohérent dans l'espace et le temps les composantes du commandement.

La nature du commandement reste inchangée mais les modalités de son exercice ont été bouleversées par une succession ininterrompue d'innovations tant sociétales (levée en masse), qu'économiques (industrialisation), que techniques (chemin de fer, télégraphe, puis aviation, téléphone, puis encore diverses "révolutions" touchant les communications). Le principal effet est de dégager progressivement le commandement de la troupe et d'introduire une chaine de commandement parfois très longue. La multiplication des systèmes d'armes et l'accroissement de leur complexité redonne à une certaine catégories des troupes une compétence technique qui en accroit le poids à la fois matériel et social. En tout cas, le commandement est devenu complexe et son organisation comme sa mise en oeuvre relève plus souvent de la technique que du militaire. plus que l'organisation du commandement, c'est sans doute le processus de celui-ci qui change, et ce aux niveaux de l'appréciation de la situation, de la prise de décision et des ordres. Les systèmes de commandement, qui permettent aux organisations de commandement de mettre en oeuvre le processus du commandement, deviennent complexes et occupent une place majeure dans les dispositifs de défense.

L'évolution de la guerre elle-même est si rapide que nombre d'officiers et d'officiers supérieurs, dans leur formation comme dans leurs compétences rejouent en pensée et en actes plus souvent qu'avant les conditions de la dernière guerre qu'ils ont connus, lesquelles peuvent alors n'avoir rien à voir avec celles du futur... (Jacques F. BAUD). De multiples observateurs scrutent la mobilité des avancements de carrière dans les armées, très différente d'une armée à l'autre, et qui dépend parfois bien plus de considérations administratives, politiques et techniques que militaires...

Les problématiques se compliquent encore à l'heure des alliances entre grands pays (OTAN, Pacte de Varsovie, OSCE), même si la répartition des postes est souvent à l'avantage de la puissance dominante. Comment coordonner par exemple des armées - sujet majeur des multiples manoeuvres militaires conjointes - lorsqu'elles n'obéissent pas aux même impératifs techniques, de la forme de la chaine de commandement aux spécifications techniques des armements?

Charles de GAULLE, L'action de guerre et le chef, dans Revue militaire française, janvier-mars 1928 ; Le Fil de l'épée, Paris, 1932. J F C FULLER, Generalship : its Diseases and their Cures, Londres, 1937. J D HITTLE, Les Etats-majors, leur histoire, leur évolution, Paris, 1958. John KEEGAN, L'art du commandement, (Perrin, 1991) Paris, 2010. Martin Van CREVELD, Command in War, Londres, 1985. M. BARES, Pour une prospective des systèmes de commandement, Polytechnicien, 1996. 

Arnaud BLIN et Gérard CHALIAND, Dictionnaire de stratégie, tempus, 2016. Daniel REICHEL, Commandement, dans Dictionnaire d'art et d'histoire militaires, Sous la direction d'André CORVISIER, PUF, 1988. Jacques F. BAUD, Commandement, dans dictionnaire de stratégie, Sous la direction de Thierry de MONTBRIAL et de Jean KLEIN, PUF, 2000.

 

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