Charles Thomas STEARNS est un politicien et pacifiste américain, membre du Conseil Territorial du Minnesota de 1849 à 1858. Membre important de la ville de Saint Cloud, il contribue à la formation du Comté de Stearns en 1855.
Une des figures les plus rigoureuses du mouvement non-violent et abolitionniste, il s'est refusé en 1840 de participer à la milice et à payer l'amende imposée pour avoir "fui ses obligations". Il est emprisonné pour cela, ce qui ne l'empêche pas d'avoir ensuite une conséquente carrière politique. Pourtant, contrairement à d'autres représentants du mouvement, eux aussi impliqués à un titre ou à un autre dans la vie politique du territoire, plus dociles ou plus pragmatiques, il considère comme inadmissible le recours non seulement à la violence proprement dite mais aussi à la "force physique non blessante" utilisée pour bloquer un délinquant.
En septembre 1855, malgré les événements (notamment la promulgation de la Fugitive Slave Law) et la division du mouvement pacifiste, il est encore confiant : "L'option de la résistance et le refus d'obéir au diable sont toujours praticables : les adeptes de la non-violence peuvent-ils assister sans réagir à l'expansion de l'esclavage et aux blessures voire à la mort de tous ceux qui essaient de s'opposer?" En décembre de la même année, il déclare : "Je ne participe pas aux préparatifs de guerre, mais je crains, si une lutte devait éclater de na pas être capable de rester de côté et de voir mes hommes tués, sans prendre un fusil ni appuyer sur la gâchette." C'est ce qui arrive.
Au début de l'année 1856, STEARNS franchit le Rubicon, mais il essaie encore, de façon aventureuse, de concilier la profession de foi non-violente avec sa participation à la lutte armée. Après avoir affirmé ne plus réussir à assister inerte aux assassinats des abolitionnistes, perpétrés de sans-froid au Kansas par les esclavagistes, il poursuit son argumentation ainsi : "La non-résistance interdit non seulement d'effacer la vie d'un être humain. Mais Dieu ne faisait pas référence à ces démons : ceux-ci sont l'engeance de Satan, et doivent être tués comme on tue des lions et des tigres. J'ai toujours dit que je tuerais une bête sauvage. Si je tue ces êtres infernaux qui viennent du Missouri, ce sera sur la base du même principe (...) Je ne devrais pas le faire s'ils étaient des ennemis ordinaires. Mais ces hommes ne sont pas des hommes, mais des bêtes sauvages (...) Comme toujours, j'aime tous les hommes, mais ces fous et brigands à la fois et, déplus, ivrognes, ne sont pas des hommes." (ZIEGLER)
C'est dire l'ambiance qui règne à cette époque, si un homme qui se dit non-violent et pacifiste écrit cela... C'est que se mêlent de plus en plus aux hommes de mains des propriétaires des esclaves en fuite, de véritables bandits qui profitent de la situation de désordre qui règne de plus en plus aux frontières des Etats du Sud et du Nord.
Pour STEARNS, il n'y a pas de contradiction entre le principe de l'inviolabilité absolue de la vie humaine et sa décision de combattre les armes à la mains les esclavagistes - du coup démonisés - du fait qu'on ne peut réellement les subsumer dans la catégorie d'homme : ce sont des bêtes ou des démons. La cohérence formelle est sauve : en procédant à la déshumanisation de l'ennemi, STEARNS ne semble même pas soupçonner que des mots d'ordre analogues à ceux qu'il lance ont produits les massacres des Indiens! (LOSURDO)
Charles STEARNS est l'auteur de nombreux ouvrages : Principles of Religion and Morality ; The Fugitive Slave Law of the United States, shown to be unconstitutional, impolitic and diabolical ; The Way of the Abolish Slavery, Facts in the Life of General Taylor, the Cuba blood-hound importer, the extensive slave-holder, and the hero of the Mexican War ; Report of the Case of Charles Sterns against J.W. Ripley, in the Circuit Court of the United States, at Boston, November Term, 1850, for Malicious Prosecution : His Honor Judge Sprague, Presiding ; The Black Man of the South, and the Rebels : Or, the Characteristics of the Former, and the Recent Outrages of the Later... Tous réédités en anglais entre 1969 et 2010, mais aucun n'est traduit en Français...
Domenico LOSURDO, La non-violence, une histoire démystifiée, éditions delga, 2015. V.H. ZIEGLER, The Advocates of Peace in Antebellum America, Indiana University Press, 1992.
Vraiment pénible ce correcteur orthographique imposé par over-blog!