La série norvégienne de 2015 en 3 saisons, dont 2 accessibles en Français, est un thriller politique imaginé par le maitre du polar norvégien Jo NESSO. Elle se veut une relation des réactions - collaborations et résistances - suscitées dans une société moderne par l'invasion venue d'un pays plus puissant.
Ayant décidé de stopper l'exploitation de son pétrole, la Norvège est envahie "pacifiquement" par la Russie, avec la bénédiction de l'Union européenne. Dans le pays occupé, le chaos menace. La population est dévorée par la peur de la guerre. Collaboration aveugle (de la part des dirigeants) ou résistance sanglante (notamment par des éléments de l'armée) sont les deux extrêmes dans une zone grise ou chacun cherche des marques. Comment faire confiance et à qui? Les scénaristes et les réalisateurs de cette fiction explorent les convulsions d'un nation européenne en crise et bousculent toutes les conventions du genre.
Bien entendu, l'ambassade de Russie en Norvège a protesté contre la diffusion de la série, même si ses auteurs disent avoir choisi ce contexte seulement en fonction de l'actualité : l'invasion de la Crimée par la Russie, possible prélude d'une nouvelle guerre froide. C'est surtout l'arrière fond de la crise climatique qui les intéresse en même temps que cette interrogation sur les réactions d'une population en arrière-fond. C'est parce que les dirigeants danois remettent en cause le modèle pétrolier que les oligarques russes et européens réagissent en laissant faire la Russie. Si la première saison met bien en relief ce contexte (centrale au thorium contre pétrole), la deuxième met plutôt en avant les méandres politiciennes de la situation. Nous n'avons pas visionné la troisième saison, pour donner un sentiment définitif sur la série.
La série n'a pas connu un énorme succès à l'audience, alors qu'elle est une des séries norvégiennes les plus coûteuses produites ces dernières années, et en novembre 2017, la chaîne de télévision TV2 hésitait à donner son feu vert pour une troisième saison.
Diffusée tout de même dans une dizaine de pays (sur ARTE en France), renouvelé en février 2018 pour cette troisième saison, elle figure parmi les séries nordiques n'hésitant pas à s'attaquer à des problèmes contemporains avec une vision critique du monde politique.
Ajoutons en cette année 2022 qu'il y aurait une certaine cruauté mentale à rapprocher les critiques de l'ambassade russe en Norvège de la réalité de la guerre en Ukraine... Car tout de même, il y a bien des éléments dans cette série (qui apparait avec le temps... minimaliste) qui rappellent des choses : la place des énergies pétrolières et gazières, la place des grands oligarques, une certaine intransigeance russe, le rôle des industries d'armement, le piège de la numérisation à un point qu'on ne sait plus qui manipule qui, le rôle des médias, les tensions entre industries de l'énergie et États qui obéissent à des logiques contradictoires... Bien entendu la place de l'OTAN (que les États-Unis ont quitté) n'est pas du tout la même (et même pas du tout du tout!). Sans doute, la Russie n'entend pas occuper l'Ukraine en mars, chose qu'elle ne disait pas en février (dénazifions, disait Poutine, ce Hitler d'une possible guerre mondiale, chassons ce gouvernement nationaliste, remplaçons-le par un gouvernement correct aux critères dictatoriaux...)
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Occupied (Okkupert), réalisation Erik SKJOLDBJAERG, John Andreas ANDERSON, Pâl SLETAUNE, Erik Richter STRAND et Eva SORHAUG, Production Yellow Bird Norway, Gétévé Productions, épisodes de 45 minutes, 18 épisodes pour les deux premières saisons, diffusion en 2015.
Relu le 23 mars 2022