28 octobre 2008
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Enquêter sur la guerre constitue une des tâches assumées par les belligérants lorsque les combats ont cessé. Ou plutôt enquêter sur une guerre, comme celles des balkans de 1912-1913, la première guerre mondiale de 14-18 ou celle du VietNam de 1969-1970, pour le massacre de My Laï. Car les guerres sont souvent suivies d'enquêtes menées par des tiers ou l'un des belligérants lui-même voulant comptabiliser les pertes humaines et matérielle, punir les coupables désignés - souvent des vaincus - et réparer, pour fixer le montant des réparations pour dommage de guerre aux vaincus, encore souvent, sinon toujours.
Cela fait penser à la continuation de la guerre par d'autres moyens, mais sans aller jusque-là, et en tout cas pas dans les études proposées dans ce numéro de la revue "Le mouvement social", il est utile de comprendre qu'avec la fin des hostilités armées, de multiples démarches pour évaluer une guerre ne sont pas seulement le fait d'historiens impartiaux et désireux de comprendre cette guerre.
L'histoire du conflit entre deux pays ou deux contrées, ou deux peuples venant de cesser leur guerre se poursuit à travers les traités et conventions ensuite signées pour y mettre fin officiellement de manière plus ou moins définitive. C'est souvent la mémoire de cette guerre qui se construit. Que ce soit chez les vaincus ou chez les vainqueurs, les leçons qu'ils en tirent sont évidemment influencées par la manière dont les enquêtes sont menées. Dégager les responsabilités d'une guerre est souvent le fait des vainqueurs, soit pour en dégager les bénéfices pour eux-mêmes, soit pour éviter qu'elle ne recommence. Si les premières raisons de la démarche de recherches des responsabilités ont guidé les responsables politiques pendant longtemps - c'était de bonne guerre (!) - les deuxièmes raisons l'emportent aujourd'hui, et ce sont des armées de juristes qui s'efforcent d'en déterminer les causes. Aujourd'hui, par exemple, le Tribunal pénal international (TPIY) utilise les données d'enquête produites par des Organisations Non Gouvernementales à des fins juridiques afin de traduire en justice les "coupables" d'atrocités commises en ex-Yougoslavie.
Cela fait penser à la continuation de la guerre par d'autres moyens, mais sans aller jusque-là, et en tout cas pas dans les études proposées dans ce numéro de la revue "Le mouvement social", il est utile de comprendre qu'avec la fin des hostilités armées, de multiples démarches pour évaluer une guerre ne sont pas seulement le fait d'historiens impartiaux et désireux de comprendre cette guerre.
L'histoire du conflit entre deux pays ou deux contrées, ou deux peuples venant de cesser leur guerre se poursuit à travers les traités et conventions ensuite signées pour y mettre fin officiellement de manière plus ou moins définitive. C'est souvent la mémoire de cette guerre qui se construit. Que ce soit chez les vaincus ou chez les vainqueurs, les leçons qu'ils en tirent sont évidemment influencées par la manière dont les enquêtes sont menées. Dégager les responsabilités d'une guerre est souvent le fait des vainqueurs, soit pour en dégager les bénéfices pour eux-mêmes, soit pour éviter qu'elle ne recommence. Si les premières raisons de la démarche de recherches des responsabilités ont guidé les responsables politiques pendant longtemps - c'était de bonne guerre (!) - les deuxièmes raisons l'emportent aujourd'hui, et ce sont des armées de juristes qui s'efforcent d'en déterminer les causes. Aujourd'hui, par exemple, le Tribunal pénal international (TPIY) utilise les données d'enquête produites par des Organisations Non Gouvernementales à des fins juridiques afin de traduire en justice les "coupables" d'atrocités commises en ex-Yougoslavie.
Ecrire l'histoire d'une guerre, ce n'est pas simplement faire "acte de mémoire", ou établir les réparations aux victimes, c'est aussi constituer une partie de la culture non seulement des peuples en cause, mais, à l'heure de la mondialisation tous azimuts, de l'ensemble de l'humanité.
C'est aussi le droit international qui se construit de cette manière. Nathalie MOINE en éditorial de ces études indiquent qu'"ils établissent un lien entre la production des normes juridiques relatives au comportement des armées et des forces d'occupation en temps de guerre et la mise en forme des récits sur la guerre qui ne sont pas encore issu du travail de l'historien mais qui répondent aux préoccupations des règlements du conflit." "Comprendre l'origine de la production de ces enquêtes et leurs attendus, c'est aussi comprendre tout ce qu'elles n'englobent pas. Quelles sont les questions laissées de côté? Quels sont les témoignages ignorés ou restés inexploités après avoir été collectés? Précisément parce qu'elles ne correspondent pas à une volonté de savoir universelle, mais parce qu'elles poursuivent un objectif précis, dicté par la législation en cours, les investigations ne peuvent ni ne veulent être exhaustives".
C'est aussi le droit international qui se construit de cette manière. Nathalie MOINE en éditorial de ces études indiquent qu'"ils établissent un lien entre la production des normes juridiques relatives au comportement des armées et des forces d'occupation en temps de guerre et la mise en forme des récits sur la guerre qui ne sont pas encore issu du travail de l'historien mais qui répondent aux préoccupations des règlements du conflit." "Comprendre l'origine de la production de ces enquêtes et leurs attendus, c'est aussi comprendre tout ce qu'elles n'englobent pas. Quelles sont les questions laissées de côté? Quels sont les témoignages ignorés ou restés inexploités après avoir été collectés? Précisément parce qu'elles ne correspondent pas à une volonté de savoir universelle, mais parce qu'elles poursuivent un objectif précis, dicté par la législation en cours, les investigations ne peuvent ni ne veulent être exhaustives".
C'est dans cette perspective que sont réunis dans ce numéro de début 2008 des articles aussi différents que "l'enquête, le délit, la preuve : les "atrocités" balkaniques de 1912-1913 à l'épreuve du droit de la guerre" (Dzovinar KEVONIAN), "Compter les vivants et les morts : l'évaluation des pertes françaises de 1914-1918" (Antoine PROST), "La commission d'enquête soviétique sur les crimes de guerre nazis" (Nathalie MOINE) ou "La rumeur de Pinkville, Les commissions d'enquête sur le massacre de My Lai (1969-1970)" (Romain HURET) ou encore "La preuve par les victimes. Bilans de guerre en Bosnie-Herzégovine" (Isabelle DELPLA). Ce sont huit cas qui sont examinés avec précision et de nombreux chiffres.
L'éditeur présente ce numéro de Le Mouvement social de la manière suivante :
"Comment se construit le bilan de la guerre? A partir de quels matériaux écrit-on l'histoire d'une guerre? L'objet de ce numéro porte sur un aspect essentiel de la fabrication du récit des guerres contemporaines : la constitution de bases documentaires, accumulées au cours de la guerre ou à sa sortie, dans la perspective de son règlement. Cette production de témoignages, oraux ou écrits, de données chiffrées, de photos, de films, contemporaine des événements, s'explique en bonne partie du fait du développement de conventions sur le droit de la guerre depuis le XIXe siècle, qui impliquent, en cas de transgressions, tout un arsenal de mesures contre le contrevenant, du paiement de réparations au jugement des crimes de guerre, crimes contre l'humanité, etc.
Cette pratique participe donc d'une histoire plus générale de la guerre moderne, qui allie des violences inouïes perpétrées contre les combattants et les populations civiles et l'anticipation, parfois dès le tout début du conflit, d'un réglement international codifié. Fondamentale pour les protagonistes, elle est rarement étudiée en tant que telle par les historiens, qui utilisent ces matériaux sans toujours en discuter les conditions de production. Les articles de ce numéro, à travers différents cas de figures issus des conflits du XXe siècle, démontent les objectifs très variables et souvent concurrents des organisations étatiques, commissions d'enquêtes non gouvernementales, administrations, qui ont pour tâche de documenter la violence faite aux corps mais aussi aux biens de ceux qui sont au centre de la plupart de ces enquêtes : les populations civiles."
Nathalie MOINE, chargée de recherches au CNRS, enseignante à l'EHESS (en 2012-1013, sur la Formation à l'histoire contemporaine des mondes russes, de l'Empire des Tsars à l'URSS, L'univers des choses soviétiques, La guerre à l'Est - URSS-Europe centrale, de 1939 à nos jours : production, usage et reconfiguration des récits), participe aussi à l'étude Sortir de la guerre en Russie (voir blog passion-histoire.net).
Enquêter sur la guerre, sous la direction de Nathalie MOINE, Le mouvement social, Janvier-Mars 2008, numéro 222, La Découverte. Site : http://mouvement-social.univ-paris1.fr.
Il s'agit d'une revue trimestrielle fondée par Jean MAITRON en 1960, publiée par l'association "Le mouvement social".
Enquêter sur la guerre, sous la direction de Nathalie MOINE, Le mouvement social, Janvier-Mars 2008, numéro 222, La Découverte. Site : http://mouvement-social.univ-paris1.fr.
Il s'agit d'une revue trimestrielle fondée par Jean MAITRON en 1960, publiée par l'association "Le mouvement social".
Complété le 4 février 2013
Relu le 10 août 2018