Existe t-il une communication violente et une communication non-violente? Ecrit comme cela, on peut en douter. Toutefois, il existe bien des intentionnalités différentes et des expressivités différentes dans la manière de communiquer, et c'est dans le sens de la promotion, du développement d'une communication qui ne soit pas agressive mais au contraire empathique, allant dans le sens de la résolution non violente des conflits que des groupes ou des individus tentent d'élaborer des techniques verbales ou/et gestuelles, indissociables à leurs yeux des philosophies qui les accompagnent.
La CNV
La Communication NonViolente (CNV) est (avec la volonté de garder cette orthographe comme rattachée à cette pensée spécifique) une expression, selon son auteur, Marshall B. ROSENBERG, psychologue américain (né en 1934), qui signifie que "le langage et les interactions qui renforcent notre aptitude à donner avec bienveillance et à inspirer aux autres le désir d'en faire autant". L'empathie est au coeur de ce processus de communication initié dans les années 1950, avec une approche centrée sur la personne.
Il s'agit de pacifier les relations inter-individuelles, dans n'importe quel cadre social (ce peut être dans une entreprise ou une association) à l'aide d'un certain nombre de techniques pré-existantes par ailleurs. Un grand nombre de travaux de pédagogues ou de psychologues... ont mis en valeur des techniques verbales ou non verbales multiples qui facilitent la communication entre les personnes et il suffit souvent de les utiliser dans le sens de la résolution des conflits inter-personnels. Nulle volonté chez leurs adeptes et animateurs de vouloir régler d'autres problèmes, d'ordre politique et économique, même si leur utilisation peut y aider.
Marshall ROSENBERG fut l'élève du psychologue CarI ROGERS. S'inspirant de la pensée de GANDHI, et des travaux de l'économiste chilien Manfred MAX-NEEF, dans ses analyses des besoins humains. Lui-même a forgé cet ensemble de techniques avec des défenseurs des droits civiques au début des années 1960, pendant lesquelles il offre des formations en médiation et en communication à des communautés travaillant à libérer des écoles et des institutions de la ségrégation. Membre du Comité de parrainage de la Coordination internationale pour la Décennie de la culture de paix et de non-violence, organisée par l'UNESCO au début des années 2000, il est l'auteur de nombreux ouvrages, traduits en plusieurs langues, sur la communication. Ainsi sont disponibles Dénouer les conflits par la Communication NonViolente (Éditions Jouvence, 2006), Les mots sont des fenêtres (ou bien ce sont des murs) : Introduction à la communication nonviolente (La Découverte, 2005)...
Sa définition est reprise par de nombreux groupes de par le monde pour diffuser ces techniques. Selon lui, toujours, le processus de la CNV, processus continuellement remis en question est la "combinaison d'un langage, d'une façon de penser, d'un savoir-faire en communication et de moyens d'influence qui servent mon désir de faire trois choses :
- me libérer du conditionnement culturel qui est en discordance avec la manière dont je veux vivre ma vie ;
- acquérir le pouvoir de me mettre en lien avec moi-même et autrui d'un façon qui me permette de donner naturellement à partir de mon coeur ;
- acquérir le pouvoir de créer des structures qui soutiennent cette façon de donner".
Thomas d'ANSEMBOURG, psychothérapeute (né en 1957) (Cessez d'être gentil, soyez vrai, Éditions de l'Homme, 2001) et David SERVAN-SCHREIBER, médecin et docteur ès sciences (né en 1961) (Guérir, Robert Laffont, 2003) proposent des définitions très voisines.
L'assertivité
L'assertivité, ou comportement assertif est considérée comme fondamentale pour la communication non violente. Concept de la première moitié du XXe siècle introduit par le psychologue new-yorkais Andrew SALTER, il désigne la capacité à s'exprimer et à défendre ses droits sans empiéter sur ceux des autres. Développé plus récemment par Joseph WOLPE, psychiatre et professeur de médecine américain ("expression libre de toutes émotions vis-à-vis d'un tiers, à l'exception de l'anxiété"), c'est l'art de faire passer un message difficile sans passivité mais aussi sans agressivité. Dans le cadre des relations humaines, l'assertivité peut être présentée comme un comportement qui s'appuie sur le refus d'avoir recours à trois comportements types à effets négatifs :
- les comportement d'agression (ou de domination par la force) ;
- les comportement de soumission, qui peuvent se matérialiser par la fuit ou l'abandon ;
- les comportement de manipulation (ou de domination par la ruse), parfois exprimés sous forme de manipulations mentales.
Plusieurs groupes adoptent des versions plus ou moins radicales de cette manière de communiquer. L'École de Palo Alto prône que l'on doit toujours dire ce que l'on pense.
L'assertivité est très étudiée dans des domaines tels que la psychologie sociale ou le management. Elle est à la base de certaines dynamiques de coaching ou de médiation dans des entreprises.
Plusieurs manières d'utiliser la CNV
Le processus de Communication NonViolente peut être utilisé de trois manières :
- communiquer avec soi-même pour clarifier ce qui se passe en soi (auto-empathie) ;
- communiquer vers l'autre d'une manière qui favorise la compréhension et l'acceptation du message ;
- recevoir un message de l'autre, l'écouter d'une manière qui favorise le dialogue quelle que soit sa manière de s'exprimer.
Cela suppose :
- une attention au moment présent ;
- une intention claire de favoriser le dialogue et la coopération.
Quatre étapes sont généralement proposées : Observation (description de la situation en termes partageables), Sentiment et Attitudes (expression des sentiments et attitudes suscités dans cette situation), Besoin (Clarifier les besoins), Demande (respectant les critères suivants : réalisable, concrète, précise et formulée positivement, et si possible pour une action faisable dans l'instant présent).
Il s'agit d'une méthode générale, indicative, et elle est présentée comme telle dans les nombreux stages organisés par différentes associations.
Réflexion spiritualiste ou Philosophie d'action
Si Marshall ROSENBERG propose dans son livre Spiritualité pratique, les bases spirituelles de la Communication NonViolente (Jouvence, Suisse, 2007) d'ancrer ces pratiques dans une réflexion spirituelle, assez syncrétiste qui fait appel à des oeuvres de GANDHI, KRISHNAMURTI, l'évangéliste MATTHIEU, Martin BUBER ou Theilhard de CHARDIN, cette réflexion n'est pas reprise, loin de loin, par tous les praticiens de la Communication NonViolente. Lui-même, dans le Centre pour la CNV qu'il anime met plutôt en avant une philosophie de l'action plus générale :
"La finalité du centre pour la CNV à l'échelle mondiale est qu'une masse de personnes utilisent la CNV pour participer à l'avènement d'une paix intérieure, interpersonnelle et institutionnelle. Le Centre pour la CNV peut atteindre cette fin en utilisant ses ressources de telle sorte que celles-ci soient au service de la vie. Cette masse critique de personnes utilisera le Centre pour la CNV comme un appui pour développer et partager une conscience spirituelle, des compétences personnelles et des aptitudes d'organisation, de façon à s'assurer que les besoins de tous soient comblés et que les conflits entre eux se résolvent de manière pacifique." (Guide de la certification, Centre pour la Communication NonViolente, www.nvc-europe.org).
De nombreux sites proposent des informations sur la Communication NonViolente. On pouvait trouver dans le mensuel Non-Violence Actualités des éléments sur ce thème.
Mashall ROSENBERG, Les mots sont des fenêtres (ou des murs) : Introduction à la Communication NonViolente, Editions Jouvence, 1999 ; Dénouer les conflits par la Communication nonViolente, Éditions Jouvence, 2006. Lucy LEU, Manuel de Communication NonViolence : Exercices individuels et collectifs, Éditions La Découverte, 2005.
ACNV France (htpp:/cnvfrance.fr) Association pour la communication NonViolente en France.
PAXUS
Relu le 26 juin 2021