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12 décembre 2012 3 12 /12 /décembre /2012 09:34

                Très loin d'un usage populaire et péjoratif, le complexe est une notion assez répandue en psychanalyse, même si chez les psychanalystes freudiens, elle a connu une désaffection progressive, si l'on excepte les expressions, non les moindres, de complexe d'Oedipe et de complexe de castration. 

    Un complexe est un ensemble de représentations et de souvenirs à forte valeur affective, partiellement ou totalement inconscients. Un complexe se constitue à partir des relations interpersonnelles de l'histoire infantile ; il peut structurer tous les niveaux psychologiques : émotions, attitudes, conduites adaptées (LAPLANCHE et PONTALIS). Du coup, le complexe, même si la psychanalyse freudienne ne s'y attache pas dans l'ensemble, est très lié aux divers conflits psychiques ; une dynamique relie, dans l'histoire d'un sujet, constitution de complexe et conflit, conflit et constitution de complexe...

 

             C'est surtout, selon FREUD et les auteurs qui s'y rattachent, l'école psychanalytique de Zurich (BLEULER, JUNG) qui fonde et développe la notion du complexe. BREUER qui écrit avec FREUD, Etudes sur l'hystérie (1895) expose les vues de JANET sur l'hystérie : "Presque toujours il s'agit de complexes de représentations, d'assemblages d'idées, de souvenirs se rapportant à des événements extérieurs ou aux enchaînements des pensées du sujet lui-même. Les représentations isolées contenues dans ces complexes de représentations reviennent parfois consciemment toutes à la pensée. Sans cette combinaison bien déterminée est bannie de la conscience".

FREUD, s'il reconnaît l'intérêt des expériences d'association, fait très tôt des réserves sur l'usage du terme de complexe et ne l'utilise que très peu (ainsi dans La psychanalyse et l'établissement des faits en matière judiciaire, 1906). Au contraire de nombreux autres auteurs : ainsi dans le Dictionnaire de Psychanalyse et Psychotechnique publié sous la direction de Maryse CHOISY dans la revue Psyché, on trouve décrits une cinquantaine de complexe. La tradition psychanalytique freudienne n'en retient que quelques uns, qui prennent toutefois une place considérable dans le corpus de ses connaissances et de ses pratiques. Nous pouvons citer le complexe de castration, le complexe d'Oedipe (celui d'Electre comme Oedipe féminin), complexe paternel et le complexe d'infériorité.

 

      Jean LAPLANCHE et Jean-Bertrand PONTALIS proposent de distinguer trois sens du terme complexe, pour en simplifier l'usage :

- Le sens originel qui désigne un arrangement relativement fixe de chaînes associatives. Le complexe est présupposé pour rendre compte de la façon singulière dont dérivent les associations ;

- Un sens plus général qui désigne un ensemble plus ou moins organisé de traits personnels - y compris ceux qui sont les mieux intégrés - l'accent étant surtout mis sur les réactions affectives. On reconnaît l'existence du complexe principalement à ce que les situations nouvelles sont inconsciemment ramenées à des situations infantiles ; la conduite apparaît alors modelée par une structure latente inchangée. Mais une telle acception risque d'entraîner une généralisation abusive : on sera tenté de créer autant et même plus de complexes qu'on imaginera de types psychologiques ;

- Un sens plus strict qu'on trouve dans l'expression - toujours maintenue par FREUD - de complexe d'Oedipe et qui désigne une structure fondamentale des relations interpersonnelles et la façon dont la personne y trouve sa place et se l'approprie.

 

  Roger PERRON souligne les points suivants :

- Il existe un écart évident entre l'usage popularisé du terme complexe dans la culture contemporaine et son usage plus strict dans les écrits psychanalytiques ;

- Si surprenant que cela puisse paraître, il n'existe guère de réflexion théorique cohérente sur la notion de complexe en tant que telle, sauf à se tourner vers des élaborations concernant d'autres termes utilisés pour désigner un ensemble organisé de processus et productions psychiques (structure, système...). la difficulté provient de la nécessité de distinguer et cependant de coordonner deux plans :

. celui où l'on décrit ainsi une structure fondamentale du psychisme, identique dans ses grandes lignes chez tout être humain, parce que, par hypothèse, constitutive du psychisme lui-même (complexe d'Oedipe, complexe de castration) ;

. celui des variantes individuelle, c'est-à-dire des spécifications d'une telle structure fondamentale en fonction de l'histoire personnelle, des imagos, du jeu des identifications... ;

- En tant qu'il s'agit d'une structure fondamentale, le complexe n'est pas caractéristique en lui-même de telle ou telle névrose ; ce sont seulement ses développements et fixations fonctionnelles fâcheuses qui peuvent prendre valeur de pathologie ;

- Dans les définitions rapportées plus haut, le complexe est "un ensemble de représentations" ; Josef BREUER précisait que ces représentations peuvent devenir conscientes, mais que ce qui est "banni de la conscience", c'est leur "combinaison". On ne peut cependant en rester aux représentations  au sens strict : dans cette "combinaison" entrent les traces mnémoniques, les fantasmes, les imagos, etc. De plus, ce qui fait l'effectivité du complexe, c'est sa charge d'affect, et en deçà sa charge pulsionnelle : son étude individuelle dans la cure conduit donc, du triple point de vue topique, économique et dynamique, à prendre en considération tout le jeu des défenses et des remaniements après coup qui ont contribué à mettre en place une telle structure fonctionnelle.

 

  En psychologie comme en psychiatrie, le terme complexe est assez peu utilisé. 

Henri PIÉRON renvoie au terme allemand Komplexion, de MEINONG (1891), comme ensemble perçu dans son unité sans analyse des relations des parties. Il renvoie aussi à la Théorie des complexes et à l'interprétation associationniste de l'unité des formes (Gestalten) de G E MÜLLER. Pour finir, il le définit comme un Ensemble structuré de traits personnels, généralement inconscient et acquis pendant l'enfance ; procédant de la cristallisation des relations humaines dans un entourage familial et social à la fois typique te singulier, qui rend compte de la façon dont le sujet assimile des situations nouvelles aux situations anciennes auxquelles il est sensibilisé.

Jacques POSTEL, se rapportant lui au terme anglais Complex, se contente de le définir comme Ensemble de sentiments et de représentations partiellement ou totalement inconscients, pourvus d'une puissance affective qui organise la personnalité de chacun, marque ses affects et oriente ses actions. 

 

Jacques POSTEL, Dictionnaire de la psychiatrie et de la psychopathologie clinique, Larousse, 2003 ; Henri PIÉRON, Vocabulaire de la psychologie, PUF, 2000 ; Roger PERRON, Complexe dans Dictionnaire international de la psychanalyse, Hachette Littératures, 2005 ; Jean LAPLANCHE et Jean-Bertrand PONTALIS, Vocabulaire de la psychanalyse, PUF, 1976.

 

PSYCHUS

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