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20 avril 2010 2 20 /04 /avril /2010 13:06

            Notion métaphorique pour certains psychanalystes, la régression est introduite par Sigmund FREUD dès L'interprétation des rêves (1900). "La régression est sans doute, partout où elle se manifeste, un effet de la résistance qui empêche la pensée d'accéder à la conscience par la voie normale (...)." Qu'est-elle pour lui? Dans un processus psychique comportant un sens de parcours ou de développement, on désigne par régression un retour en sens inverse à partir d'un point déjà atteint jusqu'à un point situé avant lui (ce qui ne fait que traduire un sens littéral). Prise au sens topique, la régression s'opère, selon Sigmund FREUD, le long d'une succession de systèmes psychiques que l'excitation parcourt normalement selon une direction donnée. Dans son sens temporel, la régression suppose une succession génétique et désigne le retour du sujet à des étapes dépassées de son développement (stades libidinaux, relations d'objet, identifications, etc.). Au sens formel, la régression désigne le passage à des modes d'expression et de comportement d'un niveau inférieur du point de vue de la complexité, de la structuration et de la différenciation (LAPLANCHE et PONTALIS).

         Dans les Trois essais sur la théorie sexuelle (1905), le fondateur de la psychanalyse évoque la notion de fixation, inséparable de la régression. La fixation est le fait que la libido s'attache fortement à des personnes ou à des imagos, reproduit tel mode de satisfaction, reste organisé selon la structure caractéristique d'un de ses stades évolutifs. La fixation peut être manifeste et actuelle ou constituer une virtualité prévalente qui ouvre au sujet la voie d'une régression. La notion de fixation est généralement compris dans le cadre d'une conception génétique impliquant une progression ordonnée de la libido (fixation à un stade). Elle est inséparable donc d'une conception du développement humain, qui est pensé par l'ensemble des spécialistes et des professionnels de la psychologie ou de la psychanalyse comme une succession de stades de plus en plus complexes. On peut la considérer, en dehors de toute référence génétique, néanmoins, dans le cadre de la théorie freudienne de l'inconscient, comme désignant le mode d'inscription de certains contenus représentatifs (expériences, imagos, fantasmes) qui persistent dans l'inconscient de façon inaltérée et auxquels la pulsion reste liée. (LAPLANCHE et PONTALIS).

Selon la conception freudienne, plus précisément, de la sexualité infantile, la fonction sexuelle se développe suivant un rythme gradué, chacune des pulsions partielles pouvant, soit suivre une évolution achevée en s'intégrant au courant général sous le primat de l'organisation génitale oedipienne, soit s'arrêter en chemin, s'attarder en se fixant à une phase antérieure du développement sexuel ou à un objet primitif de satisfaction. Dans la clinique, les perversions comme les symptômes névrotiques sont les témoins des traces de ces inscriptions libidinales du passé. (Claude SMADJA)

 

       En définitive, la Régression et la Fixation, sont plutôt des concepts descriptifs, et bien entendu les invoquer ne suffit pas pour comprendre sous quelle forme le sujet fait retour au passé.

       Dans la cure, la régression est indispensable au travail, elle fait partie du processus analytique, implique la notion de changement et appartient au processus de guérison, pense  Donald Woods WINNICOTT (1896-1971). La régression est une forme de défense et reste au service du Moi. Du côté de l'analyste, la régression formelle lui permet une autre écoute (Martine MYQUEL). Cette conception de la régression est tout-à fait celle développée par Anna FREUD (Le Moi et les mécanismes de défense).

      Michael BALINT (1896-1970) (Les voies de la régression, 1959) distingue les régressions maligne et  bénigne. La régression bénigne entraîne des effets thérapeutiques, bénéfiques, et fait même partie de la technique psychanalytique. La régression maligne est pathogène, susceptible d'entraîner le patient dans des difficultés insurmontables. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle la régression, en tant que mécanisme, est redoutée par des générations d'analystes.

Michelle Moreau RICAUD résume les travaux de Michael BALINT qui ont eu beaucoup d'influences chez les analystes. Il élabore un diagnostic différentiel, parvenant à évaluer les relations d'objet pendant la cure, entre deux syndromes nommés "Faisceau A et faisceau B" avec leurs caractéristiques constantes : confiance mutuelle ou pas, demandes modérées ou insatiables avec états d'assuétude, etc. pour éviter "l'apparition d'une forme maligne de régression", il prône le développement de techniques analytiques adaptées : l'analyste "discret" (non omnipotent, non inutilement intrusif) doit créer une atmosphère sûre et permissive dont le patient a besoin, le temps nécessaire à la régression et ce qu'il nomme "new beginning" (nouveau commencement).

       De son côté, Pierre MARTY (1918-1993), l'un des fondateurs du courant de la pensée psychosomatique française, développe une conception originale de la fixation. Pour cet auteur, le système fixation-régression est à la base de toute organisation fonctionnelle et étend son champ d'activité des fonctions psychiques jusqu'aux fonctions somatiques. Au cours des désorganisations psychosomatiques, la présence de fixations, qu'elles soient psychiques ou somatiques, constitue des paliers d'arrêt au courant contre-évolutif, à partir desquels une réorganisation psychosomatique peut s'opérer. Ainsi, selon ce point de vue, le système fixation-régression représente, dans l'évolution individuelle de chaque sujet, l'ensemble de ses aptitudes défensives. (Claude SMADJA)

 

      Les auteurs de l'ouvrage de référence sur Les mécanismes de défense définissent la régression comme un retour - plus ou moins organisé et transitoire - à des modes d'expression antérieurs de la pensée, des conduites ou des relations objectales, face à un danger interne ou externe susceptible de provoquer un excès d'angoisse ou de frustration. Ils indiquent que de nombreux auteurs se sont attachés à l'étude de la régression :  Mélanie KLEIN (1932), Paula HEIMANN (1952),  Michael BALINT (1968),  Harold SEARLES (1965), Donald Woods WINNICOTT (1947/1975), Maurice BOUVET (1956/1972), Pierre MARTY (1967), Françoise DOLTO (1973/1988). Ils donnent finalement à la régression une importance plus grande qu'accordée par Sigmund FREUD dans le développement humain. Les exemples de régression fourmillent surtout (mais pas exclusivement) dans la littérature concernant la clinique infantile, et nous ne reprendrons ici qu'une observation de Françoise DOLTO rapportée par les auteurs, faite sur un enfant ayant vécu des expériences précoces de déprivatisation maternelle :

"Il ne regarde plus autrui, son expression mimique se fige dans la détresse ou dans l'indifférence à tout ce qui lui arrive (...) Parfois, heureusement, il garde un intérêt électif pour un animal ou un objet, une collection d'objets semblables. (...) La perte (d'un objet d'une collection, de cuillers, dans ce cas) le plonge dans une intense panique. Cet enfant fait une régression et s'accroche à une seule perception, associée à la fois, pour lui, au souvenir d'un plaisir partiel de son corps et quelque chose représentant pour lui de façon fétichiste, sa relation avec sa mère".

 

Serban IONESCU, Marie-Madeleine JACQUET et Claude LHOTE, Les mécanismes de défense, Natan Université, 2003. Jean LAPLANCHE et Jean-Bertrand PONTALIS, Vocabulaire de la psychanalyse, PUF, 1976. Claude SMADJA, article Fixation, Michelle Moreau RICUAD, article Régression bénigne/maligne et Martine MYQUEL, article Régression, dans Dictionnaire International de psychanalyse, 2002.

 

                                                                         PSYCHUS

 

Relu le 27 novembre 2019

 

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