Nous pouvons lire dans le rapport 2009 de l'Organisation Internationale des Armes Chimiques (www.opcw.org/nc/fr/) :
"En 2008, l'OIAC a vérifié la destruction de 4 137 tonnes d'armes chimiques, ce qui signifie que plus de 30 000 tonnes d'armes chimiques ont été vérifiées comme ayant été détruites par l'OIAC au 31 décembre 2008. Un État partie (qui a demandé que son nom soit considéré comme "information hautement protégée") a achevé la destruction de toutes ses armes chimiques en 2008, de sorte qu'à la fin de l'année, il restait quatre autres États détenteurs. (L'Albanie a été le premier État à achever, en juillet 2007, la destruction de son stock déclaré d'armes chimiques-. Au 31 décembre 2008, l'Inde avait détruit 99%, la Jamahiriya libyenne 2%, la Fédération de Russie 30% et les États-Unis d'Amérique 57% de leurs stocks déclarés d'armes chimiques. A la fin de l'année, 9 des 12 États parties qui avaient déclaré des installations de fabrication d'armes chimiques avaient soit détruit soit converti toutes leurs installation de fabrication. Sur les 65 installations de fabrication déclarées, il en restait 4 à détruire complètement ou à convertir." En 2008, il a été "effectué 11 inspections dans 8 installations de fabrication d'armes chimiques. Au 31 décembre 2008, 42 des 65 installations de fabrication d'armes chimiques déclarées avaient été détruites. 19 avaient été converties à des fins non interdites par la Convention et restent sujettes à une vérification systématique. Sur les 4 restantes, 1 n'avait pas encore été détruites (actuellement temporairement convertie à des fins de destruction d'armes chimiques), tandis que les 3 autres n'avaient pas encore été converties."
A côté de ce travail visant les armes chimiques, écrivent Daniel RICHE et Patrice BINDER, l'OIAC poursuit sa tâche de prévention en inspectant activement l'industrie chimique. "En 2008, le Secrétariat technique a inspecté 200 installations de l'industrie chimique au titre de l'article VI de la Convention". Cette destruction est conduite dans 13 installations, dont 3 en Russie, 8 aux États-Unis, 1 en Libye et 1 en Inde. D'autres, au nombre de 6, sont en cours de construction. A la fin 2008, l'OIAC avait donc vérifié, depuis sa création,
"la destruction de 30 500 tonnes d'armes chimiques contenues dans près de 3 000 000 de munitions, conteneurs et autres cuves de stockage. Les armes chimiques de la catégorie 1 détruites (agents toxiques de guerre chimique, tels que le CX, le sarin, le tabun, l'ypérite et la lévisite) et 1 220 000 tonnes d'armes chimiques binaires (produits chimiques qui deviennent toxiques lorsqu'ils sont mélangés)." Cela comprend les "armes anciennes" abandonnées, fabriquées entre 1925 et 1946.
La mission de l'OIAC est aussi d'apporter son aide aux États qui le sollicitent et de soutenir la formation et l'information des experts. En 2008, l'OIAC déclarait avoir :
"(...) également poursuivi ses programmes d'aide à des Etats parties pour qu'ils exécutent leurs obligations au titres de l'article VII de la Convention. Pendant la période considérée, un certain nombre d'Etats parties ont reçu une assistance technique dans ce domaine, sous forme d'ateliers, de cours et de missions (...)."
Tous les 5 ans, les États parties à la Conférence Internationale des Armes Chimiques se réunissent. La deuxième conférence quinquennale d'examen, qui s'est tenue du 7 au 18 avril à La Haye, était particulièrement importante, car elle intervenait dix ans après l'entrée en vigueur de la Convention. Comme le rapportait l'Observatoire sur la non-prolifération en avril 2008, les 5 principaux enjeux de cette réunions étaient de s'assurer de :
- l'universalité de la Convention ;
- sa mise en oeuvre (respect des délais de destruction pour les Etats parties ayant déclaré posséder des armes chimiques, mise en oeuvre législative et réglementaire pour les autres ;
- le renforcement du régime de vérification ;
- la lutte contre les menaces émergentes ;
- l'utilisation de produits incapacitants non létaux.
A terme de cette réunion, il a pu être constaté que si "l'universalité a été maintes fois évoquée, peu d'idées concrètes ont véritablement émergé sur le moyen de persuader les derniers États réfractaires de joindre le régime". La question des "produits chimiques organiques définis" (PCOD, qui ne sont pas répertoriés aux tableaux de la CIAC) a été au centre d'un certain nombre de débats, soulevés notamment par la Slovénie au nom de l'Union Européenne. Enfin, la Chine s'est montrée très insistante sur la question des "armes abandonnées" sur son territoire par le Japon, qui s'est engagé à commencer leur destruction en 2010.
Le document final, adopté le 19 avril 2008, fait mention d'un certain nombre de points de convergence, mais également de désaccords issus de certains pays tels que l'Iran, plusieurs fois mentionné, mais certainement pas le seul responsable d'une intense politisation des débats. On notera, par exemple, que certains États ont rejeté l'emploi du terme '"non-prolifération", au motif qu'"aucun État partie à la convention n'est autorisé à être doté d'armes chimiques et donc ne risque, le cas échéant, de proliférer". Ce n'est bien évidemment pas la non-prolifération chimique qui est visée dans ce débat, mais bien un rappel de l'asymétrie du régime de non-prolifération nucléaire.
La Conférence se borne à appeler au respect de l'échéance de 2012 pour la fin des opérations de destruction. Enfin, toute référence aux "incapacitants" a été supprimée et la question des PCOD a été soumise à l'examen du directeur général, ce qui semble en être le plus petit dénominateur commun. la deuxième conférence n'a pas été un échec, puisque le document final a été adopté, mais son libellé traduit un manque de volonté politique de la part des États, alors que la CIAC aborde une phase transitoire, entre l'aboutissement des activités dévolues au désarmement et l'adaptation aux nouveaux enjeux (menaces non étatiques, défis de la vérification liés à la mondialisation de l'industrie, mutations scientifiques et progrès technologiques).
Daniel RICHE et Patrice BINDER, Les armes chimiques et biologiques, L'Archipel, 2011.
Relu le 8 juillet 2020