Pour l'étudiant ou le citoyen français désireux de comprendre mieux le contexte et les oeuvres de la philosophie allemande, cette jeune revue, fondée en 1994 et rénovée en 2005, est toute indiquée. Dédiée à l'histoire et la culture des pays de langue allemande, la Revue germanique internationale se veut pluridisciplinaire, ouverte aux approches des différents spécialistes internationaux intéressés par la perspective des transferts culturels.
Fondée par Michel ESPAGNE, linguiste français, directeur de recherche au CNRS et professeur à l'École Normale Supérieure et par Jacques LE RIDER, germaniste et historien français, directeur d'études à l'École Pratique des Hautes Études de Paris, elle rassemble dans son Comité de rédaction des universitaires tels que Wolfgang ADAM (Magdebourg), Norbert BACHLEITNER (Vienne), Frédéric BARBIER (Paris), Giulia CANTARUTTI (Bologne) ou Elisabeth DECULTOT (Berlin). Le directeur de publication en est Michel ESPAGNE et sa responsable de l'édition électronique, Pascale RABAULT-FEUERHAHN.
Ce comité de rédaction supervise, avec l'appui d'un Comité scientifique, deux numéros par an, numéros thématiques qui se centrent "autour d'un aspect original de la littérature, de la philosophie, de la sociologie, de l'histoire culturelle ou de l'histoire de l'art de l'espace germanophone. Dans une perspective de transferts culturels, celui-ci est abordé à travers les points d'articulation avec les aires qui l'environnent et qui l'aident à se définir, de l'Angleterre à la Russie, des Pays-Baltes à la Grèce. Les questions traitées sont souvent transversales (émergence de l'esthétique au XVIIIe siècle, genèse de l'orientalisme). Les moments de crise, de recomposition et les phénomènes participant à la constitution identitaire - l'osmose judéo-allemande, le philhellénisme - constituent un axe fort de la revue."
C'est une revue de langue française dont les articles sont accessibles en texte intégral sur le site Internet www.Revues.org, avec un délai de trois ans. Auparavant, avant 2005, où elle a rejoint CNRS éditions, elle paraissait aux Presses Universitaires de France (22 numéros).
Le numéro 12/2010 porte sur "La fabrique internationale de la science", autour des congrès scientifiques de 1865 à 1945. Ces congrès scientifiques se font entendre bien au-delà des cercles savants et possèdent une certaine influence culturelle. Parmi les précédents numéros, nous pouvons relever celui qui porte sur "Néokantisme et sciences morales" (6/2007) ou encore sur "L'anthropologie allemande entre philosophie et sciences", surtout dans les années 1930 (10/2009).
L'un des numéros de la revue (14/2011) traite de La philosophie allemande, figures de pensées, sous la direction de Michel ESPAGNE qui écrit : "L'histoire intellectuelle allemande est marquée, de la fin du XVIIIe au début du XXe siècle, par l'essor d'une discipline, la philologie, qui, ancienne dans ses origines, acquiert une dimension nouvelle à l'intérieur du champ scientifique. Pilier de la Bildung, elle contribue à fonder une identité collective allemande dans laquelle les modèles grecs antiques jouent un rôle constitutif. Ayant pour mission d'assurer la fiabilité des sources par l'édition critique des textes, elle se consacre aussi d'emblée à leur interprétation et entretient des liens particuliers avec l'histoire et la philosophie. La philologie se démarque progressivement de la théologie et des sciences orientales et inspire de nouveaux domaines de recherche comme la germanistique, les études romanes, l'histoire de l'art, l'anthropologie des religions ou la sociologie. Cette histoire intellectuelle s'incarne dans des héros de la discipline, des personnalités fondatrices comme Christian Gottlob Heyne, Friedrich Gottlieb Welcker, August Böchk, Gottfried Hermann, Georg Freidrich Creuzer, Karl Otfried Müller, Karl Lachmann, Jacob Bernays, Hermann Karl Usener, Ulrich von Wilamowitz-Moellendorff, Hermann Diels, Werner Jaeger. Ce sont eux que le présent volume prend pour point de départ afin d'étudier l'expansion continue d'une discipline et la fécondation qu'elle opère de domaines intellectuels connexes à travers des échanges scientifiques qui s'étendent au-delà de l'espace germanique."
Dans le numéro 30 de 2019, publié sous la direction Elisabeth BASSO et Emmanuel DELILLE, est évoquée l'histoire et la philosophie de la psychiatrie au XXe siècle, dans des regards croisés franco-allemands. Il s'agit pour les différents contributeurs d'explorer de manière systématique l'histoire franco-allemande de la psychiatrie, en soulignant que les traditions nationales partagent une histoire commune. Ils le font en soumettant à la réflexion de véritables cas d'étude : la psychiatrie militaire durant la Première guerre mondiale, l'émergence de catégories nosographiques (la paranoïa, le trouble post-traumatique) sous l'administration allemande, la question du placement familial, le parcours intellectuel de Jean OURY, la réception française du test de Rorschach et de la psychopathologie phénoménologique germanophone à partir des années 1920, aussi bien que le débat autour du domaine de la psychiatrie sociale.
Aux Presses Universitaires de France, était publié courant 2001, un numéro (15) sur HEGEL : droit, histoire, société, avec notamment les contributions de Duncan FORBES, Christophe BOUTON, Jean-François KERGÉVAN et Howard WILLIAMS. Ce volume mettait l'accent sur Hegel, philosophe du droit, de la société et de l'histoire et non, sur Hegel, philosophe de l'État (qui fut le thème d'un livre d'Eric WEIL). "Car ce sont des principes de la philosophie du droit, non pas une Philosophie de l'État, que Hegel rédigea. Il fut l'un des premiers à reconnaître la nécessité d'une séparation de l'État et de la société : la "société civile-bourgeoise", dont il perçut et analysa la dynamique propre. Il sut déjà mettre en relation, dans l'histoire, le développement social et l'évolution du droit. Rapportée à cette évolution et au développement de la société, sa philosophie politique s'avère fort éloignée de l'"étatisme auquel on l'assimile parfois."
C'est précisément pour lever un certain nombre d'équivoques et d'incompréhensions sur les philosophes et les philosophies allemands en général, présentes notamment en dehors du monde germanique (notamment en France et dans les pays francophones, mais pas seulement...), que cette Revue est intéressante.
Encore aujourd'hui, les philosophies allemandes de l'époque des "Lumières" ont quelque chose à nous apprendre sur la société et la vie. A l'heure où précisément, les philosophies matérialistes des Lumières sont combattues ouvertement, la Revue germanique internationale favorise une compréhension nécessaire.

Revue germanique internationale, CNRS UMR 8547, Pays germaniques : transferts culturels, École Normale Supérieure, 45, rue d'Ulm, 75005 PARIS.
www.revues.org.
Actualisé le 8 Mai 2012. Relu et actualisé le 6 juin 2020